lundi 24 mai 2010

Retraites : une évidence en trompe l'oeil



La lecture arithmétique de la question des retraites occulte des réalités moins faciles à mettre en équation, mais pourtant cruciales pour notre avenir.

Autrefois, quand on quittait la vie active, on se sentait usé et on entrait sans transition dans la vieillesse.. La retraite à 60 ans a ouvert dans nos vies un nouvel âge : celui qui permet de faire ce que l’on n’a pas pu faire auparavant, tout en étant valide encore pour quelques années.

A quoi les retraités consacrent-ils ce temps conquis ? A s’occuper d’eux-mêmes, certes, voyager, lire, jardiner… Mais aussi à s’occuper des autres. Les bénévoles associatifs sont très majoritairement sexagénaires. Beaucoup de sexagénaires sont en charge de parents très âgés. Les grands parents disponibles sont autant de solutions de substitution pour la garde des petits enfants. Et que serait le bénévolat associatif sans les jeunes retraités ?

30 ans ont passé depuis l’avènement de la retraite à 60 ans et la société en a profité pour s’organiser. Aussi retarder les départs aura de ce point de vue un coût non négligeable qui n’est jamais pris en compte dans les calculs. Les collectivités locales pourront-elles pallier le recul du bénévolat familial et associatif en développant des services professionnalisés ? Qui pourra payer ces services ? En cherchant à équilibrer le compte retraites, on va déséquilibrer d’autres comptes sociaux.

Retarder le départ à la retraite comporte aussi un autre inconvénient : celui de retarder d’autant l’entrée des jeunes dans la vie active. Cela sera mécanique dans le secteur public, d’autant plus si la moitié des départs ne sont pas remplacés. Dans le privé, les entreprises savent trouver des moyens de « se débarrasser » des plus âgés. Mais on verra augmenter le chômage des seniors et on risque une perte de compétitivité si les nouvelles générations sont moins facilement intégrées. Et l’objectif d’augmenter les recettes de cotisations retraites ne sera pas atteint si le nombre de cotisants reste le même.

Les défis sont immenses et complexes. A vouloir les relever par compartiment, nous risquons de nous enfoncer en peu plus. La question des retraites ne peut pas être dissociée de la vision de notre avenir économique. A l’évidence, le modèle tout-libéral ne fonctionne plus. Il faut réinventer une nouveau modèle économique, dont les critères ne soient pas seulement économiques mais aussi écologiques et sociaux. Dans ce modèle, le bénévolat et l’organisation de proximité joue un rôle fondamental. Et les jeunes retraités y ont une place irremplaçable.